Le Mor-doux

La Nouvelle-Zélande, c’est connu pour ses moutons, ses kiwis, mais aussi pour la trilogie de Peter Jackson, le Seigneur des Anneaux. Et quel endroit plus emblématique de la série que la Montagne du Destin, le fameux Mount Doom?

Situé dans le parc national du Tongariro, le volcan du Ngauruhoe est toujours en activité, avec sa dernière éruption en 1974. Une randonnée de 20km traverse la chaine volcanique, qui comprend également des lacs volcaniques aux couleurs intenses. Tout cela réuni fait que le site reçoit chaque année des milliers de randonneurs.

Alors, pour l’ambiance, pour éviter la chaleur de la fin de l’été et la foule, pourquoi ne pas tenter l’ascension de nuit?

Là y’a de l’ambiance!

Un petit camping du Departement of Conservation, situé à proximité du départ, mais sans douche ni eau potable, permet de passer la nuit et de démarrer tôt.

A 02h00, il est tant de se glisser dans la peau de Frodon. Perdu dans la brume, la lune éclairant d’une lumière blafarde les nuages accrochés à son sommet, le Mont Doom est là. L’escalade sera t’elle aussi terrible que dans le film?

ça n’a pas l’air simple…

Il faut tout d’abord rejoindre le pied du volcan. Le sentier est extrèmement bien balisé, et même pavé, pour supporter le passage des très nombreux visiteurs sans abimer le milieu naturel entourant le sentier. Comment Frodon a t’il pu louper un tel sentier?! Entre les pavés et les piquets à neiges réfléchissants, il est impossible de s’égarer, même de nuit et dans la brume.

Il ne manque plus que le bitume, et c’est une route.

La montée jusqu’au col est régulière, et il n’y a pas un bruit. Seul quelques ruisseaux se font entendre au milieu du marécage. Là encore, peu de risque de s’embourber, le sentier passe sur un pont de planches traversant toute la lande. Les nuages dissipés, la voie lactée apparait, suspendue à la voute céleste, terminant sa course à la pointe du volcan.

Mordor style!

Il y a même des escaliers… Pas de quoi en faire un film hein Sam!

Au col, les choses sérieuses commencent. Le brouillard montant de la vallée enveloppe tout, et paradoxalement, un vent glacial descend du volcan, si bien que la nappe reste sur place. Pour localiser la meilleur approche du volcan, ça va être coton. Les conseils du DOC ne sont pas plus clairs: il faut tailler droit dans la pente, il n’y a pas de sentier. Un autre site internet conseillait de viser une coulée de lave commençant sur le deuxième tiers du volcan. Dans tous les cas, la visibilité est de 5 mètres. On va plutôt viser au sud, tant que ça monte, c’est que je suis dans la bonne direction.

Devant, il y a un gros tas de cailloux de 2200m . Vive le brouillard.

Et si le pseudo-sentier commence tranquillement sur un petit lit de cendre, on comprend vite pourquoi Sam a galéré à porter Frodon: les scories roulent sous les pieds, et monter d’un pas c’est l’assurance de dégringoler d’autant. Les rochers tiennent un peu mieux, mais quand ils se mettent à rouler, la gamelle est plus rude. Le rocher est vif, abrasif, et la pente est très forte: debout, en tendant les bras devant moi, je peux presque toucher le sol. La pente est en moyenne de 45°. Il est clair que monter dans les scories, ça ne va pas être possible très longtemps.

De vrais roulements à billes ces cailloux… Encore un coup de Sauron, c’est sûr!

Heureusement, le brouillard finit par se dissiper, et la coulée de lave apparait au loin dans le faisceau de la lampe. Heureusement que la lampe est puissante, j’aurai eu du mal à identifier ce que je voyais sinon.

Une fois sur la coulée, ça roule moins, mais l’ascension est toujours aussi raide. A mi-parcours, le soleil se lève, révélant le Mont Tongariro et ses lacs, qui n’étaient jusqu’alors qu’une grosse masse noire. Avec les quelques étoiles encore présentes dans le ciel, c’est superbe. Le soleil rasant fait apparaitre des fumeroles sortant du sol ou des rochers. C’est donc de là que vient l’odeur de soufre que l’on sent depuis les marais!

Pssshhhhhhhhhhh

Et c’est enfin le sommet. Le cratère est en fait ouvert, et il est possible de faire le tour par les crêtes ou de marcher à l’intérieur. Le vent est toujours très fort, et dissipe les vapeurs de soufre. Cependant, il vaut mieux suivre les recommandations du DOC et ne pas s’aventurer à l’intérieur du cratère, où les vapeurs sont plus importantes, au risque de s’intoxiquer.

Depuis les crêtes, tout le massif s’offre à la vue. Le Tongariro, ses lacs, mais également le Mont Ruapehu, toujours enneigé. Mais déjà le soleil monte, de même que les touristes. Les premiers se font entendre dans le bas de la vallée.

Si monter dans la cendre est les scories se révèle un cauchemar, la descente est nettement plus fun. Pas besoin d’avoir recours à des aigles géants, il suffit de « skier » directement sur la cendre. La descente est du coup bien plus rapide que la montée. Cela n’empêche pas de se retrouver sur les fesses de temps en temps, l’occasion de s’apercevoir que le sol est drôlement chaud par endroit, malgré la fraicheur ambiante. Il ne faut pas oublier que le volcan est toujours en activité!

tout shuss!

De retour au col, et après avoir vidé les chaussures de la cendre emmagasinée lors de la descente, on ne peut qu’apprécier de s’être levé tôt en apercevant la foule piaillante, qui malgré l’heure matinale se compte déjà par dizaines. Les plus aventureux se lancent en ballerines ou au mieux en baskets légères à l’assaut du volcan. Bonne chance.

et pourquoi pas en tongs aussi?

De jour, l’endroit et tout de même plus accueillant. Petites fleurs, tapis de mousse… Heureusement que l’équipe du film a ajouté des gros nuages noirs et camouflé les plantes vertes, sinon on se serait cru chez les elfes!

Là, ça fait plutôt Mordoux!

La descente jusqu’au parking est finalement plus compliquée que la montée. Un flot ininterrompu de personnes occupe le sentier, et toutes ne se poussent pas pour laisser descendre les gens en sens inverse.

En résumé, l’ascension de nuit du Mont Ngauruhoe est faisable, avec une bonne frontale, au moins des chaussures basses de randonnées (j’ai regretté de ne pas avoir au moins des demie-montantes pour éviter les cailloux qui roulent et viennent taper les malléoles) et quelques barres de céréales pour éviter la fringale à l’heure du petit déjeuner sur les pentes du volcan. Le sentier est très bien balisé jusqu’au col, et même sur le volcan, quelques piquets indiquent la direction à prendre, mais en cas de brouillard, impossible de les voir. La vue au sommet vaut vraiment le détour, et ça vallait le coup de se lever!

Les terribles Orcs du Mordor!

Les Goblins frisés, c’est coup de Saroumane!

Highway to Hell

Stairway to heaven

kiwi!